Dans les années 1980, au Lac-Saint-Jean, un petit gars solitaire devient la risée de ses camarades qui le surnomment Grosse Douceur. Il traverse l’adolescence tête baissée et trouve ses repères dans l’alcool et la vie nocturne. Débarqué à Montréal, il est grisé jusqu’au point de rupture par les attraits de la restauration. Récit initiatique à l’humour cinglant, le premier roman de Jean F. Boily rencontre l’histoire du Québec, ce demi-pays qui peine à naître autant que le personnage marqué par ses défaites.
Extrait
À force de se faire piétiner, on s’habitue à mourir un peu. Par détachement, je m’étais coupé de mes émotions. Je promenais mon cafard silencieux de la maison à l’école à la piscine, en observant la vie des autres avec intérêt et envie. Le gros de ma vie sociale se passait avec mon père au chic bar La Gourde, les jeudi et vendredi soirs, dans l’attente que ma mère finisse de travailler à 21 heures. En sirotant des Shirley Temple dans l’ambiance feutrée égayée par l’alcool des jours de paye, je me droguais au sucre en répondant aux banalités répétitives d’adultes peu doués pour parler à l’adolescence.
On en parle
Accrochez-vous : malgré le titre, le récit est tout sauf doux, plutôt intense, carrément trash par bouts. Parce que la plume est diablement bien aiguisée, juste assez colorée et, entre une dérape ici, une ligne de coke là, ou un quasi-coma éthylique ici ou là – non, on n’exagère pas –, Jean F. Boily se permet plusieurs envolées patriotiques dignes d’un cours d’histoire du Québec 101, la poésie cynique des espoirs déchus en prime.
— Silvia Galipeau, La Presse
Affirmons-le sans détour : ce premier roman de Jean F. Boily est d’une immense beauté. Les courtes phrases incisives, mêlant la tendresse et le cru, sans effets de style artificiels, font mouche. La plume de l’auteur, fluide, poétique et sagace (à la manière d’un Francis Ouellette), ne nous épargne aucune once de vérité ni de violence. Un nom à retenir, absolument.
— Sarah-Louise Pelletier-Morin, Le Devoir